Chanceline Mèvowanou| « Dream building camp for girls est un camp pour encourager chez les filles la perspective d’avoir des rêves et de se battre pour… »

Dream building camp for girls ! Un camp pour inspirer les filles de 10 à 20 ans à nourrir des rêves est la prochaine initiative citoyenne que va conduire l’activiste des droits des filles Chanceline Mèvowanou. Le projet s’annonce pour la période du 28 juillet au 3 aout prochain dans la commune d’Avrankou à quelques kilomètres de la capitale, Porto-Novo. A bâton rompu, elle nous raconte…

L’activiste Chanceline Mèvowanou. Photo: Alassane Kader

Mamabenin : Chanceline Mèvowanou bonjour !

Chanceline Mèvowanou : Bonjour à vous !

Mamabenin: Vous êtes une activiste engagée pour le respect des droits des filles et militer aussi pour l’épanouissement des filles. Comment est né cet engagement pour les filles ?

Chanceline: Tout a commencé par une simple curiosité. Une observation, une interrogation. Tout a débuté par une envie de comprendre les choses qui se font, qui se construisent autour de moi. Dans le village (Avrankou) où j’ai grandi, il était fréquent d’apprendre qu’une fille de 14ans, de 15ans ou de 16 ans est tombée précocement enceinte avant même de franchir la classe de 3e. Quand la grossesse survient, soit la fille rejoint l’auteur, soit les parents s’en occupaient. Certaines de ces filles abandonnaient l’école. Pourquoi tombaient-elles enceinte sans le vouloir pourtant ? Je me posais très souvent cette question. Puis en classe de Première en 2013, j’ai été sélectionnée boursière du programme américain Corps de la Paix (Peace Corps) au Bénin. Les formations, les échanges avec Adam Kendis, mon volontaire à l’époque m’ont apporté une réponse : « Ces filles tombaient si précocement enceinte parce qu’elles ne sont pas mieux informées sur les changements qui s’opéraient sur leur corps, comment faire face à ces modifications et surtout que retenir de ce que disent les parents, le professeur, les amis à l’école, les semblables du quartier… ». Mon engagement est né de cette désillusion. Les adolescentes de mon village ne tombaient pas enceinte parce qu’elles étaient inconscientes, ou sans pudeur comme le pensaient les gens. Non !  Ce n’est que le résultat de l’éducation qu’elles ont reçu. Elles n’ont pas toutes les informations sur leur sexualité et ne savaient pas comment faire des choix sains. Nonobstant, elles sont les premières à être insultées, discriminées, dévalorisées, données en mariage précoce, contraintes et réduites au silence. J’étais révoltée en silence. Après l’obtention de mon BAC en 2014, je me suis faite la promesse de m’outiller davantage et de revenir au village pour aider, informer et lutter contre cette ignorance qui nuit à l’épanouissement des filles.

Et la lutte contre les grossesses précoces chez les filles est devenue votre bataille mais aussi vous pensez qu’il faut inspirer les filles à nourrir des rêves n’est-ce pas ?

Chanceline: Oui, exactement. J’ai écrit récemment sur mon blog chancelinemevowanou.com  un article intitulé « Le rêve de les voir rêver ». Autour de moi, toutes les filles n’ont pas cette chance de côtoyer la ferveur, l’engouement que procure le fait d’avoir des rêves. Toutes les filles n’ont pas une raison de s’accrocher, de se battre. Toutes les filles n’ont simplement pas l’opportunité d’inscrire leurs rêves, leurs ambitions, leurs objectifs. Or, ma foi, le fait pour une fille d’avoir des rêves et de se battre pour est un facteur déterminant dans la lutte contre les grossesses précoces en milieu scolaire. Je l’ai démontré dans mon article. Posons-nous deux questions. Est-ce que vous pensez que le fait pour une fille d’avoir des rêves et des ambitions, en prendre conscience et s’inscrire dans une logique de se battre résolument pour les réaliser pourrait l’aider à faire des choix sains afin d’éviter les grossesses précoces en milieu scolaire ? Est-ce que vous pensez qu’il y a une chance sur dix qu’une fille qui a des rêves, des ambitions, qui s’estime beaucoup, qui résiste à la pression des paires ne puisse pas tomber dans le piège d’une sexualité assez précoce ? Ma foi, la réponse c’est oui. Dans mon article, j’ai écrit : « Mes rêves m’ont aidé à retarder le plus longtemps possible, ma première expérience sexuelle ». Ils m’ont aidé à faire des choix sains, à attendre d’avoir toutes les informations avant de décider. Et je pense qu’on doit commencer à prendre ce paramètre sur les rêves des filles en compte.

Et du coup, pour inspirer les filles à rêver, à nourrir des ambitions…votre prochain projet est un camp baptisé « Dream building camp for girls ». De quoi s’agit-il vraiment ?

Chanceline: « Dream building camp for girls » en français camp de construction des rêves pour les filles est un camp pour encourager chez les filles, l’idée, la perspective d’avoir des rêves et de se battre pour.

Quelles sont les raisons qui motivent cette initiative ?

Chanceline: Deux raisons principales ont motivé l’initiative de ce camp. Premièrement, les filles ne sont pas éduquées à être des championnes, des battantes. L’éducation familiale inculquée aux filles quelque part a aussi failli à sa mission. Dans nos communautés, les filles grandissent sans modèles, sans ligne directive. Le tort ne saurait être attribué aux parents. Qui pourrait donner une chose qu’il ou elle ne possède point ? C’est une responsabilité collective. Nous sommes tous coupables. A travers ce camp, nous avons voulu faire une promotion des rôles modèles pour aider les filles à s’inspirer et trouver dans les expériences d’autres femmes, la force d’avancer. Ensuite, l’idée pour une fille de faire de ses rêves une priorité  va aider dans la lutte contre les grossesses précoces en milieu scolaire et les abandons scolaires. Cela va aider à créer une génération de jeunes filles actrices de changement. Alors ce camp pour nous, est une base pour aider les filles à construire leurs rêves et à en sortir avec la motivation qu’il faut pour se battre. C’est donc un camp ordinaire mais dans le contenu, ça n’a rien d’ordinaire.

Concrètement ça se passera comment ce camp ?

Chanceline: Déjà c’est du 28 juillet au 03 Août 2019 à Avrankou. L’enceinte du CEG 3 Avrankou est le site du camp. C’est pour les filles de 10 à 20 ans avec priorité donnée aux bénéficiaires du programme Académie des Jeunes Filles Leaders. Nous sommes dans une dynamique de continuité pour mieux mesurer l’impact de nos actions sur les filles et mieux les suivre. C’est pour les filles des départements de l’Ouémé et du Plateau qui vont s’inscrire. Chaque jour, nous aurons des sessions de formation et de discussion avec les filles. Des formatrices ont été invitées pour venir discuter avec les filles.

Un bref aperçu de ce qui sera partagé avec les filles

Chanceline: Des sessions sur comment vaincre sa peur, la peur de dire, la peur du rejet. Comment gérer la pression négative des paires ; des sessions sur l’estime de soi, la confiance en soi…Des séances de partage d’expérience avec des femmes exemples de réussite; des sessions sur la santé sexuelle; des sessions sur les rêves et les objectifs de vie, leadership féminin et art oratoire, des ateliers de poésies-slam.

À la fin de ce camp, quels sont vos espoirs pour les filles ?

Chanceline: Que chaque fille s’en sorte avec la conviction qu’il y a possibilité de se battre et réaliser ses rêves. Mon rêve est de les voir rêver et devenir des actrices de changement.

Mamabenin: Chanceline Mèvowanou merci !

Chanceline Mèvowanou : Merci beaucoup à vous !

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1 réponse

  1. Merci pour ce travail assez pertinent et juste. Bien fait.

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